Minx
Porno et féminisme, le cock(!)tail hilarant

Reste à convaincre la très prude Joyce qu’elle peut faire avancer ses idées au milieu de photos de mannequins masculins dénudés, mais aussi que la sexualité des femmes est un sujet important du féminisme. Ensemble, ces deux personnages que presque tout oppose se lancent dans cette aventure un peu folle où tout reste à inventer, puisque le désir et le plaisir sexuels féminins sont alors encore tabous dans la société.

Minx raconte avec beaucoup d’humour et d’effronterie la naissance des premières revues érotiques à destination des femmes dans les années 1970, en posant frontalement la question de l’égalité de traitement entre la nudité des femmes et des hommes, la série brille aussi par son féminisme convaincant.

Un seul éditeur croit à ce projet de magazine féministe, mais pour que Joyce accepte de travailler avec lui, ça va pas franchement se faire tout seul! Cet éditeur joyeux et sans complexe, c’est Doug Renetti, qui fait dans le porno pour mec. Doug va réussir à convaincre Joyce grâce à la parabole du médicament pour chien! Pour réussir à faire prendre un médoc à son toutou, comment est-ce qu’on s’y prend-il? Il faut cacher le médicament. Pour ce faire, il suffit d’enrober la pilule de beurre de cacahuète… Donc, pour faire passer un discours féministe que la prude et bien-pensante société amerloque des seventies rechigne fortement à avaler, quel sera le beurre de cacahuète, demande Doug? La réponse est simple: des bites! Beaucoup de bites. En photo, en dildo, en promo. Découvrir un joli garçon bien membré en page centrale et lire les articles de fond signés Joyce Prigger à propos, par exemple, du plaisir sexuel féminin ou de l’IVG.

Ce serait mentir de prétendre que la série manque de nudité masculine frontale, comme si sa créatrice, Ellen Rapoport, voulait combler un manque dû à une surabondante production cinématographique et télévisuelle qui, depuis des lustres, étale les filles à poil en premier-plan, en arrière-plan, en long, en large et en travers. Et, à l’instar de l’éditeur fictif Doug Renetti, la réelle showrunneuse Ellen Rapoport se révèle plutôt talentueuse pour nous administrer le médicament. Le féminisme n’a pas un simple statut de prétexte à la gaudriole coquine dans la mesure où Minx offre un aperçu substantiel des sujets dont Joyce se soucie, des sujets portés par les collaboratrices et les collaborateurs de la publication, sur leur lieu de travail, dans une comédie terriblement efficace et qui n’est légère qu’en apparence.

Âge d’or des magazines féministes et du porno destiné aux femmes, le début des années septante a d’une part vu naître Ms., magazine fondé par les féministes et militantes sociopolitiques Gloria Steinem et Dorothy Pitman Hughes, paru pour la première fois en 1971, et, d’autre part, Playgirl en 1973. Il existait même un journal équivalent au fictif Minx, Viva, qui fut publié par Kathy Keeton et son mari Bob Guccione, éditeur de Penthouse, de 1973 à 1980. On assiste dans Minx, à la parution du numéro spécial de Cosmopolitan d’avril 1972, en page centrale duquel l’acteur Burt Reynolds a posé complètement nu, les jambes savamment croisées pour qu’on ne voie pas son zdek!

Même s’il est largement temps d’équilibrer les nudités entre sexes, ce n’est pas que l’abondance de quiquettes qui m’a séduit dans cette série. Les personnages emblématiques que réunit le scénario y sont pour beaucoup, d’autant que la distribution est parfaite! Ophelia Lovibond campe une Joyce autant militante qu’oie blanche un peu coincée tout à fait convaincant. Jake Johnson n’a pas son pareil pour incarner un Doug Renetti voyou au cœur d’or. Sans oublier Lennon Parham qui joue la sœur aînée de Joyce, bien plus au fait de la chose sexuelle que sa cadette et dont les répliques font mouche à chaque fois. Et puis Jessica Lowe! Elle est Bambi, modèle très dévêtu des autres magazines de Doug. Bambi voit dans l’arrivée de Joyce une ouverture professionnelle ensoleillée. Son bon sens confondant bien qu’un peu angélique confère une puissante ressource comique à l’ensemble!